(EcoFinances) – La mise à l’écart des imprimeurs locaux du très juteux marché des manuels scolaires (plus de 130 milliards de FCFA de chiffre d’affaires par an) cette année est à l’origine de l’actuelle de la pénurie à laquelle l’on assiste depuis quelques jours au Cameroun et qui ne manque pas de stresser les parents d’élèves, à quelques jours de la rentrée scolaire, selon plusieurs professionnels de ce secteur d’activité approchés ces derniers jours par EcoFinances.Net.
« La vérité c’est que nos grands frères (éditeurs) ont commandé la production des manuels scolaires au programme en Chine cette année, au détriment des imprimeurs locaux qui paient non seulement des taxes sur les intrants (papier et encre), mais aussi génère de nombreux emplois localement tout en payant d’autres impôts et taxes comme la TVA à l’Etat. Cette année, ils n’ont confié qu’une infime partie de la production des livrets (livres d’exercice) aux imprimeurs locaux, préférant donner le marché de l’impression du livre aux imprimeurs étrangers (chinois, notamment) », déplore un imprimeur actif au quartier Akwa, à Douala.
Qui ajoute : « Ceci pour la simple raison qu’en imprimant sur place, cela leur revient un peu plus cher. Nous imprimons la page à environ 40 à 45 FCFA, tandis qu’en Chine ils l’obtiennent à 25 FCFA voire un peu moins la page. Et en le faisant, ils gagnent, certes, de l’argent, mais ce qu’ils oublient c’est que cela fait perdre beaucoup d’argent à l’économie. Sans compter que si ces livres (des millions de livres au programme) étaient imprimés sur place, l’on pouvait dire aux imprimeurs de se presser afin d’empêcher la rareté actuelle ».
Pénurie et inquiétudes des parents d’élèves
Contrairement à certains éditeurs qui tentent d’expliquer l’actuelle pénurie par la « faible industrialisation du pays », les imprimeurs locaux interrogés par EcoFinances.Net affirment le contraire. « Nous avons des machines de dernière génération capables de produire des manuels scolaires de qualité et dans des délais courts. Malgré cela, nous sommes écartés au profit de la Chine où tout est subventionné. Ici, nous payons les taxes sur tout, ainsi que l’énergie qui nous revient chère. La vérité c’est que les ainés ont préféré aller là où ils peuvent faire de grosses marges », renchérit un imprimeur du quartier Deido, dans l’arrondissement de Douala 1er.
A quelques jours de la rentrée scolaire prévue le 09 septembre prochain, d’après le programme officiel arrêté par les ministres des Enseignements secondaires (Minesec) et de l’Education de base (Minedub), les manuels scolaires du primaire et du secondaire peinent toujours à être disponibles dans les points de vente des grandes villes et campagnes du pays. Et les parents ne cachent pas leurs inquiétudes.
« Cela fait une semaine que j’essaie d’acheter des livres à ma fille qui fera la classe de Form I (sous-système éducatif anglophone, Ndlr) cette année, mais je n’y arrive pas. J’étais déjà ici (librairie Presbook de Kotto, arrondissement de Douala Vème, Ndlr) samedi surpassé (31 août 2024, Ndlr), mais je n’ai pu acheter que 03 livres sur les 13 manuels au programme cette année. Et afin de m’assurer de les avoirs tous, j’ai même versé la totalité du coût de ces livres. Sauf que je reviens ce mardi matin (03 septembre 2023, Ndlr), pour m’entendre dire que ces livres ne sont toujours pas encore disponibles », explique Joseph Tedom, parent d’élève, à sa sortie de la libraire Presbook de Kotto ,dans l’arrondissement de Douala V.
Foires promotionnelles
Une pénurie qui se montre de plus en plus persistante à seulement six (06) jours du démarrage de l’année académique 2024-2025 au Cameroun, pour ce qui ces établissements du primaire et du secondaire. Tout comme elle intervient au moment où le ministre du Commerce (Mincommerce), Luc Magloire Mbarga Atangana, essaie, tant bien que mal, de multiplier des opérations de ventes promotionnelles à travers le pays. Afin de limiter l’impact de la rareté des livres sur le marché, et contrer la spéculation.
Pour rappel, le marché des manuels scolaires génère un chiffre annuel oscillant depuis 2022 entre 134 milliards et 150 milliards de FCFA. Un juteux marché qui non seulement contribue aux recettes fiscales de l’Etat, mais crée aussi et surtout des milliers d’emplois au profit de nombreux camerounais qui en tirent des revenus substantiels permettant de faire tourner l’économie nationale.
JRD