(EcoFinances) – A travers ses filiales au Cameroun (Cameroon Steel Sarl) et au Congo (Sangha Mining), la société Bestway Finance Ltd ambitionne de faire baisser le prix du fer à béton au Cameroun, en transformation 18% du fer extrait de ses mines congolaises et camerounaises, selon des sources internes à l’entreprise. En effet, Bestway Finance Ltd et son partenaire chinois AustSino, avec lequel il forme un consortium pour l’exploitation des gisements de fer dans ces deux pays (Nabeba et Mbalam), ont signé, le 25 juin 2021, un MoU (Mémorandum d’entente) avec l’Etat Camerounais, pour la construction du chemin de fer de plus de 500 km entre Mbalam et le Port en eaux profondes de Kribi. Le contrat y relatif a d’ailleurs été signé le 25 février 2022 à Yaoundé.
« Afin de préserver les intérêts supérieurs de l’État, Bestway Finance Ltd lutte afin de faciliter la transformation nationale de 3% du fer extrait de ses mines congolaises d’Avima, Badondo et Nabeba, permettant d’introduire 02 millions de tonnes d’acier en supplément sur le marché et donc, au Cameroun, de renforcer sa position d’exportateur net d’acier, pour le plus grand bénéfice de la balance commerciale du pays », déclare un cadre de la société.
Avant d’ajouter : « Cette augmentation massive de la production locale de l’acier, accentuée par l’addition potentielle de la transformation de 15% du minerai de fer extrait de Mbalam, tout en offrant au Cameroun de pleinement bénéficier de la totalité de la chaîne de valeur relative à la transformation du fer en acier, permettra surtout de réduire le coût de cet intrant stratégique ».
A l’en croire, la compétitivité économique nationale, l’industrialisation du pays et le secteur immobilier en seront les tous premiers bénéficiaires, ouvrant de fait notamment la voie de l’accès au logement à des centaines de milliers de ménages.
Une ambition qui contraste avec celle de Prométal
L’ambition que nourrit actuellement Bestway Finance Ltd, et qui est d’ailleurs louable, contraste (malheureusement) avec celle d’un géant de la production du fer à béton au Cameroun comme Prométal. C’est d’ailleurs en tout cas ce que pensent nombre d’acteurs de ce marché. Lesquels estiment que, bien que bénéficiant de grosses exonérations fiscales chaque année, cette firme peine à respecter son cahier des charges.
En effet, Prométal, qui voit le jour en 2008, avait pour ambition de permettre la transformation de 15% du fer issu de la mine de Mbalam, soit 2,25 millions de tonnes, en acier. Sur la base de cette ambition, la firme a obtenu en 2010 une convention de partenariat dotée d’un cahier des charges particulièrement avantageux, d’un point de vue fiscal et douanier, afin de lui permettre de mobiliser les fonds requis à la construction d’une aciérie d’une telle capacité.
C’est ainsi que, de 2010 à 2019, Prométal a, apprend-on, bénéficié de plus de 155 milliards de FCFA d’exonérations, ce qui représente plus de 04 fois l’impôt total payé par la société, sur la même période, et plus de 160% de la valeur des investissements globaux déclarés comme ayant été effectués. « Au-delà de l’importante économie qu’il a ainsi permis de générer, le cahier des charges dont bénéficie Prométal a fondamentalement altéré l’équilibre local du marché, octroyant à la société un quasi-monopole économique sur le marché de l’acier et donc, entre autres, du fer à béton », fait savoir un acteur du marché.
Valeur mercuriale particulièrement élevée
Du côté des concurrents de Prométal, zéro avantage fiscal. Ces derniers ont, au cours de la même période, essentiellement dû se soumettre à une valeur mercuriale particulièrement élevée en ce qui concerne l’importation de certains des intrants métallurgiques, telles que les billettes. Par contre, Prométal a, apprend-on, bénéficié de l’usage de la valeur transactionnelle, couronnant par conséquent l’arsenal fiscal et douanier supportant son modèle économique. « Il convient de noter que les billettes en question sont un demi-produit, autrement dit un produit semi-fini. L’engagement de transformation du minerai de fer en acier, passant donc par la transformation de ce dernier en billette, raison même de la mise en place du cahier des charges de Prométal il y a 12 ans de cela, n’est jusqu’à aujourd’hui pas respecté », explique un expert du secteur de la production du fer à béton.
Hausse des prix du fer à béton au détriment des ménages
Malgré cette situation avantageuse, qui a permis à la société d’engranger un chiffre d’affaires de plus de 400 milliards de FCFA durant sa première décennie d’exercice, lors du revirement à la hausse du marché de l’acier à l’international il y a quelques mois de cela, Prométal a requis et obtenu de l’État une réévaluation des tarifs appliqués. « C’est ainsi que, depuis fin 2021, l’on assiste à une croissance drastique du prix de produits essentiels tels que le fer à béton avec un passage du fer: 1)- De 6 de 1200 FCFA à 1750 FCFA (+46%); 2)-De 8 de 2700 FCFA à 3200 FCFA (+19%); 3)-De 10 de 3800 FCFA à 4500 FCFA (+18%); 4)-De 12 de 4500 FCFA à 6500 FCFA (+44%) », précise un industriel.
Qui ajoute : « Avec plus de 74% de parts de marchés, Prométal, leader monopolistique incontesté, dicte les hausses susmentionnées, malheureusement au prix du ralentissement industriel de la Nation, de la régression de sa compétitivité, et surtout de la diminution de la capacité d’accès au logement des ménages de la République du Cameroun ».
Avec l’arrivée de Bestway Finance Ltd et son partenaire AustSino dans l’exploitation et la transformation des mines d’Avima, de Badondo et de Nabeba (au Congo), ainsi que de Mbalam (au Cameroun), les analystes du secteur minier pensent d’ores et déjà que ce consortium « se verra logiquement octroyer, en exclusivité, un cahier des charges similaire à celui initialement accordé à Prométal ».